Cartographie métiers Podcasteur

Podcast : le boom des audiences !

Longtemps resté l’apanage des stations de radio pour réécouter leurs émissions, le marché du podcast explose en France depuis quelques années maintenant, avec une croissance exponentielle des contenus diversifiés proposés. À tel point, que le métier se professionnalise et les candidats souhaitant créer ou tenir un podcast sont de plus en plus nombreux.
Le réseau des formations commence à s'étoffer, car il ne suffit pas d'un smartphone pour créer un contenu audio de qualité. Devenir podcasteur requiert des connaissances et du savoir-faire dans plusieurs domaines : écriture audio, placement de voix ou encore en postproduction.


Des utilisateurs toujours plus nombreux

En premier lieu, revenons sur la définition de ce format numérique. Le podcast ou audio à la demande (AAD) désigne tout contenu audio téléchargé ou écouté en streaming (flux continu) sur n’importe quel type de terminal. Un contenu audio que l’on écoute principalement, voire essentiellement, avec son smartphone. Les podcasts sont à l’audio ce que YouTube est à la vidéo. Et la différence avec la vidéo réside dans le fait qu’un podcast peut se faire n'importe quand avec des écouteurs ou une enceinte Bluetooth.
Apple est le créateur du concept, sachant que le mot « podcast » provient de la combinaison des termes « iPod » et « broadcasting ». En France, Arte radio est le premier site internet à avoir proposé des podcasts gratuits dès 2002, mais ce média a souffert d'un déficit de notoriété pendant longtemps. Même s’il n’est toujours pas autant utilisé en France que dans les pays anglo-saxons, il devient désormais un canal important de diffusion. Son nombre d'auditeurs mensuels est passé de 1,4 million d’auditeurs en janvier 2020 à 2,7 millions en septembre (+93% en 9 mois) ; et respectivement de 5,8 millions d’écoutes mensuelles en janvier 2020 à 11 millions en septembre 2020 (source : Baromètre du podcast natif en France, Acast).

Un boom des audiences qui peut s'expliquer par la facilité avec laquelle on peut avoir accès au contenu audio. Avec le terme explicite de « baladodiffusion », employé au Canada, on cerne mieux l'intérêt d'une écoute numérique. En effet, on peut avoir accès aux podcasts en se baladant, quel que soit son moyen de locomotion : à pied, en voiture, en train, à vélo, en avion ou en bateau. On ne peut pas en dire autant des articles de blog ou de toute autre forme de contenu visuel. Une liberté d'écoute qui séduit les utilisateurs. Ces derniers sont d'ailleurs de plus en plus friands de ce canal d'écoute.
31%, c’est le pourcentage d’auditeurs de podcasts chaque mois, selon le “Digital News Report 2020” qui a dirigé une enquête dans vingt pays. En France, ce taux avoisine les 26 %. Mais les statistiques se sont envolées pendant les différents confinements à l'échelle mondiale. Aux États-Unis, la part de l’écoute à la maison a augmenté de 44% pendant la crise sanitaire. Surtout chez les moins de 35 ans qui représentent la plus grande part d'auditeurs. L'univers du podcasting - y compris les livres audio – a donc le vent en poupe surtout chez un public jeune qui en fait usage de manière spontanée avec son mobile.

L'actualité : thème phare

Côté contenu, nombreux sont les podcasts qui traitent de sujets liés à la vie quotidienne, au sport, au voyage ou encore à la psychologie. Mais l’actualité et la politique restent en tête des thèmes préférés. Près de la moitié des usagers déclare écouter un podcast lié à l’actualité. Les utilisateurs décrivent le fait que ce format permet de comprendre un débat complexe et offre davantage de perspectives que les autres types de médias. Une manière de prendre le temps d'assimiler une information, de la décortiquer ...Bref le podcast semble apporter un éclairage dans un monde de plus en plus assombri par les « fast news ».
L'univers du podcasting possède également plusieurs genres. Arte radio, précurseur en la matière, a rapidement compris les possibilités qu'offre cette évasion auditive. Fiction, documentaire, série de portraits complètent les bibliothèques sonores. Ils offrent ainsi une bulle immersive. Les podcasts de faits divers connaissent également un succès colossal. Sur certaines plates-formes, ce sont souvent eux qui caracolent en tête.

Podcast natif ou replay ?

Il faut dissocier deux types de podcasts : celui dit natif et le traditionnel. Le podcast traditionnel correspond au replay des stations hertziennes classiques (France Inter, Europe 1, BFM, etc.). Ils permettent de réécouter des émissions issues de la grille de stations de radios en dehors de l’écoute en temps réel.
Le podcast natif, c’est du contenu audio qui est disponible uniquement sur les plates-formes d’écoute et qu’on n’aura pas déjà entendu à la radio. Ils sont souvent imaginés et portés par des particuliers, journalistes indépendants, professionnels, entreprises, associations et syndicats, sans oublier les politiques. Voici d'ailleurs le top 20 des podcasts les plus téléchargés en France en 2020.



Celui qui décide de créer son podcast doit bien choisir l'orientation qu'il souhaite lui donner. Bien souvent, il a le statut de freelance et choisit de parler de sujets pour lesquels il a une expertise, une opinion étudiée ou encore une passion. L'auditeur ne s'y trompera pas et il aura ainsi beaucoup de chances pour que son podcast trouve un auditoire. Le podcast natif offre également une liberté de création qui n'est pas forcément permise à l'antenne. Les créateurs de podcasts n'étant pas contraints par des limites de durée ou de ligne éditoriale, ils sont libres de parler de ce qu'ils veulent, dans le ton, avec les invités et dans une durée qu'ils souhaitent. L’objectif est clairement de se faire connaître, de bénéficier d’un succès conséquent et de pouvoir ensuite générer des revenus notamment via la publicité.

Il existe aussi une autre catégorie : le podcasteur d'entreprise. Celui-ci est avant tout un créateur de contenu numérique pour le compte d'une société. En tant que salarié il participe à l’animation du site internet et des médias sociaux en constituant des chroniques, des études, des tests ou des talk-shows. L’objectif est d’assurer la visibilité d’un site et de développer la curiosité. Il comprend et maîtrise les notions de streaming, de compression, d’encodage et tous les formats internes. Il peut aussi travailler en collaboration avec le community manager.

Qu'il soit salarié ou freelance, le podcasteur doit également mobiliser ses connaissances techniques avant de se lancer, mais aussi d'établir une méthodologie :

− Définir un lieu de captation : ce choix du lieu de captation est primordial. L’idée est de réduire au maximum les bruits environnants, parasites qui pourraient obliger à passer beaucoup de temps sur le montage. Plus les conditions d’enregistrement sont optimales et plus le temps passé à retirer ces bruits parasites lors du montage sera minimisé.

− Le temps de l'enregistrement : bien régler le micro, le placer à une bonne distance de l'interviewé. Bien souvent, ce que nous possédons autour de nous permet déjà de s’enregistrer. L’utilisation du téléphone est déjà un bon outil même si ses limites se feront vite sentir si le podcast prend de l'ampleur. Néanmoins, il est possible d’améliorer la qualité sonore du téléphone grâce à des micros externes. Soigner tous les éléments qui pourraient altérer la compréhension ou nécessiter un rattrapage fastidieux lors du travail audio en postproduction.

− Travailler sa voix : intonation, débit, rythme. Il n’y a pas d’image donc la voix est clairement l'instrument qui fera rester ou fuir l'auditeur. C’est un média d’accompagnement c'est-à-dire que l’auditeur peut faire autre chose en écoutant. D’où l’importance de le maintenir en alerte grâce à l’intensité, l’intonation, le débit et le rythme de la voix.

Une fois, ces aspects du podcast gérés il faut également penser à sa diffusion. Savoir sur quelle plate-forme ou quel site internet le diffuser afin que le podcast soit téléchargeable et lisible par les internautes. Parmi les plates-formes les plus convoitées, Spotify, ont investi plus de 500 millions de dollars dans les podcasts.

Un modèle économique à inventer

La difficulté de ce métier réside actuellement dans le statut hybride qui est sien. Les créateurs, dont l'activité est souvent au croisement du statut de journaliste et d'auteur, sont exposés à une errance contractuelle. Les auteurs les plus en vue aujourd’hui sont pour la plupart issus de la radio publique ou d’autres médias. Les auteurs peuvent être salariés ou liés par des contrats de cession de droits d’auteur. Les rémunérations des auteurs, même dans le cadre du service public de la radio, demeurent très modestes compte tenu de l’économie générale du secteur. Malgré l'opacité régnant sur le sujet, certains professionnels avancent que le prix d'un podcast se vend entre 200 et 9000 euros l'épisode.
Jusqu’à une date récente, dans tous les pays, la création et l’écoute des podcasts reposaient presque intégralement sur une économie de la gratuité pour l’auditeur, le contenu étant financé par la publicité ou par une redevance.

Aux États-Unis, le marché publicitaire du podcast représentait 314 millions de dollars en 2017 et pourrait monter à 750 millions d’ici 2022. En France, difficile de savoir ce que le phénomène représente côté revenus publicitaires. Preuve d'un modèle économique encore à inventer.